Aujourd'hui on parle chemin de fer !
Très précisément de la vie des trains qui ne font pas demi-tour en gare. Ceux qui repartent dans la nébuleuse ferroviaire et malheureusement ne reviennent pas à l'heure pour leur départ... Où sont-ils donc passés ? Dans quel espace-temps ont-ils disparu ? Que leur est-il donc arrivé ???
Enoncé du problème : Soit un train arrivé en gare de Z à 12h, devant subir différentes opérations de maintenance à 10 km de là pour assurer ensuite le train de 19h : expliquez pourquoi il sera une fois sur deux en gare à 19h15 soit en retard...
Délesté de ses voyageurs, votre train est joyeusement parti là-bas au "chantier" car 1/ on ne peut pas garder tous les trains en gare toute la journée par manque de place 2/ certaines interventions techniques demandent des installations industrielles 3/ attendez, je vous raconte. "Là-bas" recouvre plusieurs endroits, plusieurs actions, plein de monde et d'aléas. "Là-bas" il y a...
L'atelier
Mécanique, l'atelier : on y fait la révision des voitures de train... Certains s'occupent d'intervenir sur les problèmes signalés par les conducteurs et contrôleurs dans les "carnets de bord" lors de chaque voyage. D'autres réalisent les opérations imposées tous les xxxx kilomètres. D'aucuns vérifient l'usure des roues, etc... Pour ausculter et traiter convenablement les différents organes, il faut pouvoir accéder sous tous les angles aux véhicules : pas de "pont-levant" comme chez nos garagistes mais, à l'inverse, des "fosses" qui permettent aux agents du Matériel de descendre sous le train. On est dans le dur (c'est le cas de le dire).
La machine à laver
A laver le train ! Certes, on peut voir en gare des agents de nettoyage, armés d'immenses brosses et raclettes, qui font les carreaux mais pour nettoyer 200 à 400 mètres de toits, parois et portes l'humain ne fait pas le poids. D'où des machines à rouleaux (comme pour votre véhicule personnel oui oui) adaptées au gabarit des trains. Ca n'a pas l'air vital au premier abord mais ça se repère tout de suite quand ce n'est pas fait (bah l'est sale ce train pouah !).
Le chantier de préparation
De jolies voies côte à côte avec des rames partout et du personnel qui s'agite : nettoyage intérieur, aspirateur, vidange et/ou plein en eau des toilettes, approvisionnement en savon et papier (toilette), mise en place des destinations et numéros de voiture, enlèvement puis replacement des "volants marque-place" (les petits papiers jaunes au-dessus des sièges qui signalent la réservation dans les Corail par exemple). La préparation du train quoi, vous voyez ???
Le dépôt
Le garage des locomotives. Pour les trains classiques il aura bien fallu un engin moteur pour amener la rame au chantier, il en faudra un autre pour le ramener en gare. On ne les laisse pas accrochés à leur train pendant les opérations de préparation car ils ont d'autres choses à faire dans la vie (assurer d'autres trajets ou se soumettre à des révisions mécaniques). Donc un petit coin (souvent rond) rien que pour les locomotives... et leurs conducteurs.
Des postes d'aiguillage
Vu l'imbrication du truc il y en a toujours plusieurs ! Celui qui amène le train jusqu'à l'atelier. Celui qui s'occupe de la partie des voies qui font entrer et sortir les locomotives. Celui qui gère les manoeuvres de formation (il y avait 7 voitures, il faut en rajouter 7 autres qui attendaient à l'autre bout du chantier, histoire d'avoir un graaaand train de 14 voitures pour les départs du week-end). Celui qui récupère les trains tous prêts à partir vers la gare...
Tous ces circuits, organisations, circulations sont vieux... comme le chemin de fer ! Font partie de notre production quotidienne. Sont donc parfaitement maîtrisés. Et pourtant... La découverte d'une anomalie sur le matériel qui va demander deux heures d'intervention non programmée, une locomotive en panne au mauvais moment, un conducteur envoyé sur un engin moteur auquel il n'a pas été formé, une inattention du poste d'aiguillage qui aura coincé le train A derrière le train B, une vidange de toilettes oubliée... Chaque grain de sable va prendre des dimensions désolantes. Surtout quand ce sont toujours les mêmes trains qui morflent. Et donc leurs voyageurs.
Même sans incident, certaines de nos "constructions" sont fragiles : le train maudit qui prend tous les jours du retard est parfois "juste" mal placé dans l'ordre des opérations, tombe à l'heure des changements d'équipes, est un matériel nouveau et mal connu ou tout simplement on ne lui a pas laissé assez de temps de préparation au chantier dans la conception des horaires...
10 kilomètres plus loin, les agents d'accueil de la gare désespèreront juste de devoir affronter les clients légitimement usés car leur foutu train est encore et toujours en retard. Allez expliquer l'inexplicable....
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Train en retard
Voyageur en pétard
Houspille chef de gare.
Rédigé par : Pas un numéro | 02 décembre 2008 à 16:43
Pffff, quelle organisation !... Je l'ai toujours dit : les trains jetables, y'a que ça de vrai ! :~)
Rédigé par : Tant-Bourrin | 02 décembre 2008 à 18:55
Un train en retard ? Non ça n'est pas possible, c'est de la S(nc)F !
Rédigé par : Andiamo | 03 décembre 2008 à 10:43
Effectivement, le voyageur lambda n'a pas conscience de tout ce qui se passe en coulisses ! Ca doit prendre une sacré place, un "garage" à trains !
Rédigé par : Louisianne | 03 décembre 2008 à 13:27
Et en plus, les voyageurs ont cette fâcheuse habitude de vouloir tous voyager aux mêmes heures : le matin et le soir (logique).
Les trains rentrent donc le matin, sales, cassés ... et doivent tous être prêts vers 16h30 afin de faire leur mission du soir.
Là les techniciens s'arrachent les cheveux tout en misant sur un stock de pièces qu'ils n'ont pas (ça coûte cher du stock donc on fait à minima).
Les problèmes de commande de personnels vont eux même tous voir jour aux mêmes heures et de fait, grippé un système déjà tendu.
Aussi, entre ateliers débordés par des "commandes" pour les mêmes heures, dépôts bouchonnés par des sorties aux mêmes heures et voies blindées par des évolutions aux même heures ... vives les horaires décalés.
Rédigé par : Nipou | 04 décembre 2008 à 13:55
Petit problème : Un train est censé arriver à 09 heures, être garé pour entretien/nettoyage et être dégaré pour mieux repartir dans l'autre sens à 19 heures.
Or sachant qu'un jour pas fait comme un autre, ce train n'arrive qu'à 13 heures, qu'il n'y a plus personne de disponible pour le garer, et qu'à l'atelier, les gars ont arrêté de l'attendre, est-ce que ce train aura plus ou moins d'une heure de retard au départ le soir ?
Z'avez 4 heures...
Comment ça je fais du mauvais esprit ?
Rédigé par : Rouk' | 04 décembre 2008 à 20:01
Qu'il est intéressant de se trouver confronté avec ce que les anglo-saxons appellent (dans les sociétés de service) le back office, autrement dit, tout ce que le client ne voit jamais.
Nous avons eu un très intéressant chapitre sur la sécurité ; le temps est venu de la gestion du temps. Au fond, si on devait décrire le métier de la SNCF, on obtiendrait un consensus sur le transport de personnes et de marchandises. Oui, mais ce serait faire l'impasse sur des savoir-faire clés que sont, notamment, la sécurité et la gestion du temps, sans lesquels l'entreprise ne serait ni fiable, ni crédible.
Arriver à faire circuler des tonnes de ferraille sur des lignes de ferraille en toute sécurité et selon des horaires, reconnaissons-le largement respectés à la minute, relève du tour de force. C'est la magie d'une société qui cultive un savoir-faire et une organisation qui ont fait leurs preuves depuis plus d'un siècle, traversant plusieurs innovations majeures (la traction [vapeur, diesel, électrique, gaz, turboréacteur], le modèle commercial...) et les structures (compagnies privées, la nationalisation en 1937, la dissociation infrastructure / réseau commercial avec RFF / SNCF).
Il me semble que nous traversons une étape intermédiaire entre une SNCF intégrée verticalement, gérant tant l'infrastructure que les flux, à une stucture plus éclatée marquant la dichotomie infrastructure / flux. D'un point de vue comptable, la SNCF devient bénéficiaire ; RFF est plombée par les coûts d'investissement et les inévitables frais de maintenance et d'emprunts. La question n'est pas de savoir quelle est la meilleure organisation, mais plutôt, dans tel ou tel cas, quelle est la meilleure répartition des investissements qui préserve un service qui se veut toujours public. Le fait que certaines lignes "décrétées" secondaires par RFF et qui faute de crédit d'entretien se trouvent réduites à une circulatuon limitée à 50 km/h me paraît hazardeux. Une ligne est soit sécurisée, soit dangereuse. Cette recherche du "milieu" un peu "batard" me met mal à l'aise... Sur un autre chapitre, les problèmes répétés de caténaires sur les LGV me laissent perplexe. C'est nouveau. Les gamins qui lisent des bouquins anarchistes n'expliquent pas tout. Visiblement, des économies de bout de chandelle sont aussi à regarder... Je m'en tiens là pour conserver à ce blog sa vocation ferroviaire. :)
Rédigé par : Boucicaut | 04 décembre 2008 à 21:18
"""Allez expliquer l'inexplicable...."""
Heureusement, tu es là :-)
Rédigé par : pousse manette | 04 décembre 2008 à 22:57
Oui l'exactitude de la SNCF, c'est de la quasi unanimité, non ? C'est toujours mieux que partir en avance, comme le *%@# de bus de ma fille le fait régulièrement q:-(
Rédigé par : Saoulfifre | 05 décembre 2008 à 08:33