Essayons de coller à l'actualité. Soit une grève à la Sncf (pas grand risque que cette chronique ne se démode) et des conséquences très différentes selon les métiers. On comprend aisément que, sans conducteur, il va être difficile de partir mais la question se pose : comment le fait que les contrôleurs soient en grève pourrait empêcher les trains de rouler ? Ou si vous préférez : "on ne va quand même pas supprimer mon train parce qu'il n'y aura pas de contrôle à bord" ???
En effet, non, on ne va pas supprimer des trains pour cela... Mais parce que les Agents du Service Commercial des Trains (les contrôleurs) sont tout bonnement indispensables. Peu connue, leur première mission est la sécurité. Du train et des voyageurs. Viendront ensuite "le confort à bord" et la "préservation des recettes" (les sous, le contrôle). Mais encore ?
La sécurité des circulations
Commençons par le plus simple : les contrôleurs donnent souvent le départ des trains. Le conducteur, là-bas tout en tête, ne peut pas voir (sans caméras) si l'embarquement est terminé : dans un certain nombre de gares, c'est le contrôleur qui lui donne l'assurance que l'on peut partir sans avoir fermé les portes sur un voyageur (c'est plus propre).
Plus subtil : la nécessité de remplacer un automatisme. La fonction de sécurité du contrôleur est celle "d'agent d'accompagnement" : il va parfois être amené à voyager en cabine de conduite lors de certaines pannes. Les trains sont équipés d'un système qui arrête automatiquement le train si le conducteur ne se manifeste pas toutes les minutes environ (imaginons un instant un conducteur victime d'un malaise) : quand ce système est défaillant, le contrôleur sera présent pour déclencher l'arrêt d'urgence en cas de problème.
Plus sportif : en cas d'obstacle sur les voies (coulée de boue, voiture ayant franchi un passage à niveau, ...) il est de bon ton de faire arrêter tous les trains se dirigeant vers le pépin. Bien que nous vivions à l'époque des téléphones portables et autres technologies modernes sans fil, le chemin de fer prévoit encore que le conducteur et le contrôleur partent chacun de leur côté, avec différents ustensiles - dont des torches à flamme rouge qui signalent un danger immédiat, et courent environ sur 1,5 km pour prévenir les convois arrivant sur la zone.
Plus rare : la participation aux essais de freins. Tous les trains qui roulent ont, avant leur départ, fait l'objet d'un "essai de freins" qui consiste en gros à vérifier que l'on arrivera à arrêter 300 ou 400 tonnes de matériel et de voyageurs aussi rapidement que possible. Il arrive qu'une panne pendant le trajet oblige à recommencer la procédure. Sur les trains classiques (une locomotive et des voitures) cet essai demande une personne à l'avant du train et une personne à l'arrière : devinez qui s'y collera ?
La sécurité des voyageurs
Qui passe une annonce à bord pour demander s'il y a un médecin dans l'assistance lors du malaise d'un voyageur ? Et qui tient à disposition du médecin en question une trousse de secours équipée des produits de première urgence ? Qui prévient la Police de venir à la prochaine gare en cas d'agression ou de bagarre ? Qui doit installer les "escabeaux de secours" lorsqu'il faut faire descendre 500 personnes sur le bord de la voie parce que le train est en panne et qu'il faut changer de rame ?
J'en oublie mais difficile de s'en passer non ?
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PS : de plus en plus de matériel est maintenant en "Equipement Agent Seul" : comprenez qu'avec des caméras et des écrans en cabine c'est le conducteur qui est l'agent seul. C'est le cas essentiellement sur l'Ile-de-France et des lignes Ter très fréquentées.