Cette fois encore, cela n'annonce rien de bon. Pour celle ou celui qui l'entendrait - bien installé dans son train, patientant en gare pour partir ou attendant quelqu'un - il va falloir traduire que... tout va s'arrêter. Etant posé et compris qu'aucun corps humain de 50 à 100 kilos n'a une chance de gagner contre une masse de 400 à 1500 tonnes lancée même à petite vitesse, dès qu'il y a vagabondage sur les voies les trains s'arrêtent. Indépendamment des conséquences, on peut tout de même se poser la question "mais qu'allaient-ils faire dans cette galère ?"
Inconscience collective
Sans entrer dans le débat des trains arrêtés en ligne suffisamment longtemps pour que les voyageurs - exaspérés - finissent par descendre ; tous les jours en gare des passagers mettent leurs vies en danger pour économiser quelques minutes. Soit l'arrivée d'un train de "très grande banlieue", un bon millier de personnes, dont les occupants se déversent sur un quai trop long, trop encombré, pas assez rapide et fluide à leur goût et plusieurs dizaines de voyageurs qui trouvent plus rapide de couper court - au travers des voies - pour rejoindre plus rapidement qui son métro, son bus ou son bureau. Alors, qu'est-ce-que l'on fait ???
Dans la gare, ces trains sont connus du chef de gare, des agents sur les quais, des postes d'aiguillage et, tous les matins à la même heure, chacun fait ce qu'il peut pour limiter les dégats... Dans la mesure du possible le poste d'aiguillage organisera l'arrivée sur un quai où un train est déjà garé de l'autre côté : imposssible de traverser ! Les agents sur le terrain essayeront de penser à passer par là pour siffler à tire-larigot et alerter sur le danger. Le chef de gare signalera - une fois de plus - le problème dans son rapport et, les jours de mauvaise humeur, demandera l'intervention de la Police Ferroviaire ou de la Police tout court pour verbaliser les inconscients : puisque la pédagogie (des annonces sonores précisant en urgence et sur un ton peu amène que "pour votre sécurité, ne traversez pas les voies !!!!") semble moins efficace que la peur du gendarme...
Piste de progrès (oui je peux parler en bois :) ) : peut-être devrions-nous envisager de bloquer ce train tous les jours quelques minutes avant l'arrivée en gare en donnant pour explication qu'il y a "des voyageurs dans les voies" ????? Mauvaise idée ? Je sais...
Moyen de revendication
Sans entrer dans le débat des invasions de voies par différents corps de métier ou corporations souhaitant ainsi manifester leur mécontentement contre tout et n'importe qui sans rapport aucun avec le ferroviaire ; des voyageurs - ulcérés par leurs conditions de transport, les retards trop réguliers et autres péripéties désagréables - expriment parfois leur contrariété en descendant dans les voies. Soit un plus ou moins petit groupe de personnes debout devant un train, en empéchant le départ. Alors, qu'est-ce-que l'on fait ???
Eh bien... on négocie !!! Une fois le problème découvert (quoique souvent les voyageurs-revendicateurs ont la gentillesse de prévenir que ça va chauffer aujourd'hui, grand merci), le chef de gare fonce sur le quai - en braillant à la radio de bloquer toutes les circulations dans le périmètre histoire de ne pas écrabouiller quelqu'un vu qu'il ignore encore l'étendue de l'invasion - et se prépare psychologiquement à la confrontation. Il n'y a pas de mystère, ni de surprise : nous avons là des clients fachés, souvent à juste titre, qui entendent bien qu'on les écoute, voire qu'on fasse quelque chose pour eux. J'ai découvert récemment que l'intervention du / de la chef en uniforme est bien accueillie - ils connaissent assez le système pour savoir que nous allons assurer leur sécurité - mais qu'il existe une vraie connaissance de la Sncf : les raleurs-bloqueurs de trains ne souhaitent pas avoir comme interlocuteur un agent en tenue, fut-il chef "sur le terrain" : ils veulent un "vrai responsable", en costume de ville, descendu des bureaux ! S'exprime là une certaine solidarité cheminots/clients où l'on considère que nous sommes dans la même galère et que les têtes pensantes doivent cette fois venir s'expliquer sur le quai.... Rafraîchissant ! Le chef de gare s'occupera donc de protéger les revendicateurs, de remettre la gare en route en faisant prudemment reprendre le trafic, de prévoir avec les forces de l'ordre l'éventuel prochain blocage, pendant qu'un patron négociera la libération des voies.
Piste de progrès : fournir à ces clients un service suffisamment satisfaisant pour qu'ils n'en soient pas réduits à de telles extrémités ??? Idée provocatrice ? Je sais...
Il doit se sentir dans les paragraphes ci-dessus une vraie colère contre les uns et une (surprenante ?) indulgence pour les autres. Que l'on ne s'y trompe pas : quelque soit le prétexte, des voyageurs sur les voies sont une cause de peur majeure pour les cheminots ! Peu importe si le trafic va être bloqué, les trains retardés, la situation embrouillée et difficile à remettre en place : il y a des gens sur les voies et ils risquent leur vie... Une vraie priorité !
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PS : photographie sauvagement "copiée-collée" depuis l'excellent site partenaire metro-pole.net (par pure flemme d'aller faire la photo) : bien évidemment je la retire si cela pose problème (et/ou cite l'auteur dont je n'ai pas trouvé les références)