Dimanche 25 mars, réveil à 4 heures (enfin 5, selon si l'on a mis sa montre à l'heure avant ou après, bref !) pour aller jouer avec les petits trains dans ma petite gare... Sieste de 15 à 18 heures... Semaine à venir sur le même rythme : en marge du changement d'heure qui touche tout le monde, il est "des petits arrangements avec le temps" spécifiques aux cheminots en horaires décalés.
Faire rouler les trains 365 jours sur 365 et 24 h/24
Bah oui ! Pour faire tourner la baraque, rouler les trains s'entend, il faut bien du monde tout le temps ! Pour être honnête, en gare il nous faut vraiment des agents tous les jours de la semaine, mais un peu moins la nuit. Sortis des trains de nuit et de tardives destinations "banlieues" l'ambiance s'allège considérablement après 21 heures. Malgré tout quelques cheminots sont nécessaires pour superviser le nettoyage des voies - recouvertes ad libitum d'emballages, bouteilles et canettes vides, billets de trains et autres prospectus ; le nettoyage des sols - carrément plus facile sans voyageurs ; le nettoyage des rames (qu'est-ce-qu'on nettoie) ; la vérification du bon fonctionnement des installations - ascenseurs, escalators, écrans sur les quais, composteurs et autres automates ; bref ça bosse ! Il s'agit également d'être vigilants sur les trains vides qui n'arrêtent pas de circuler : retour aux ateliers pour révisions mécaniques ou arrivée en gare pour départ du lendemain, la gare est fermée mais des trains roulent encore et toujours...
En roulement ou à la réserve 365 jours sur 365 et 24 h/24
L'organisation du personnel pour couvrir tous ces jours et ces nuits est évidemment assez fine. Elle se répartit entre les agents en "roulement" (planning prévu à l'avance et répétitif sur l'année) et ceux de "réserve" (qui viennent remplacer les premiers pendant les repos, congés, maladies...). Pour revenir à nos moutons et donc au chef de gare, ses horaires sont conçus entre matinées (6h / 14h), journées (11h30 / 19h30) et soirées (16h30 / 00h30). Le rythme est habituellement le suivant en roulement : quelques matinées (entre 3 et 5 de suite), deux repos, quelques soirées (de 3 à 5), deux ou trois repos. Il y a des petits veinards qui squattent le roulement de journée et qui ne font que les 11h30/19h30, je blague, car c'est évidemment samedi et dimanche compris. L'avantage majeur est que le planning est prévu très en avance : chacun connait son programme pour les 6 mois à venir. Pour ceux de la réserve - votre servante - c'est plus aléatoire puisque, par définition, nous venons en remplacement de nos collègues. En général, je sais à peu près ce qui m'attend dans les quinze jours à venir mais après... surprise ! Sachant que le temps de travail est annualisé (débrouillez vous pour trouver ce que ça veut dire), le suspense porte surtout sur les week-end : en gros on doit avoir un samedi et un dimanche "ensemble" tous les 5 week-end mais avec l'annualisation la notion est élastique. Ainsi, j'avais été jusqu'ici plutôt gâtée mais, ces derniers temps, j'ai cumulé des séries de 6 journées de travail entrecoupées de repos qui ne comprenaient pas de week-end complets (ben tiens !) ; ça donne à peu près ça pour le dernier mois :
Lu | Ma | Me | Je | Ve | Sa | Di | Lu | Ma | Me | Je | Ve | Sa | Di |
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Lu | Ma | Me | Je | Ve | Sa | Di | Lu | Ma | Me | Je | Ve | Sa | Di |
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m |
s |
s |
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s |
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m |
(Légende : s = soirée, j = journée, m = matinée). Mea culpa, j'ai bien conscience que ce sujet à l'air un peu austère à voir comme cela mais tout cela à des conséquences très concrètes...
Savoir quel jour on est 365 jours/365 et 24 h/24
Le résultat des courses est, à titre personnel, une perte permanente de repères et un décalage horaire à l'année. Après 20 ans de travail "classique" sur le rythme 5 jours travaillés pour 2 de repos, le passage aux horaires décalés, même depuis plusieurs mois, me désoriente totalement. Point tant les horaires en eux-mêmes (grâce à une capacité de s'endormir quasiment à volonté pour laquelle je remercie à genoux ma maman, mon papa et leurs bons gènes) mais le décalage sur les jours de la semaine... je frôle l'alzheimer ! Se réveiller un jour de repos avec l'idée, logique quelque part, que l'on est un samedi matin alors que la maisonnée est déjà partie vaquer à ses occupations parce que l'on est lundi... bon ! Savoir que l'on va pouvoir faire ses démarches administratives en toute tranquillité un jeudi mais dormir toute la journée parce que l'on a finit à 4 heures du matin... on fera avec ! Enchaîner une journée (arriver au travail à 11h30) après une soirée (départ la veille à 00h30 si les trains étaient à l'heure) et avoir ainsi l'impression d'avoir dormi sur place : on s'y fait ! Partir en pleine nuit dans les rues hivernales de Paris avec les hordes de fêtards du dimanche matin en s'étonnant à chaque fois que tous ces gens soient dehors en pleine semaine... on s'habitue...
Mais m'avoir fait bosser ce dimanche 25 mars à 6 heures, en me piquant en plus une heure de sommeil, alors que c'est mon anniversaire : là je dis "la vie est trop injuste" !!!
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PS : l'organisation "horaire" décrite ici varie d'une gare à l'autre et n'a valeur que d'exemple