La tendance ferroviaire en France est de plus en plus aux trains à réservation obligatoire (Tgv et Téoz) dont le principal atout commercial est de garantir une place assise à chaque voyageur. Théorie séduisante que la réalité s'acharne malheureusement à contrarier car dans la pratique, le chef de gare doit régulièrement arbitrer la répartition des places que ce soit pour deux clients se présentant pour le même siège ou, plus aventureux, pour un train au grand complet.
Au cas par cas : "même pas mal" !
Pour bien comprendre la relative décontraction du cheminot face au problème, quotidien, de deux voyageurs se disputant la même place il faut - comme lui - être bien convaincu que la "double-réservation" n'existe pas ! Quoiqu'on puisse lire à gauche ou à droite et malgré les rumeurs relayées sur le sujet : vendre deux fois une même place de train est im-po-ssible !!! Et dans les cas, rarissimes, où deux clients sont bel et bien en possession d'un billet identique c'est tout simplement que l'un des deux n'est pas en règle (et je me garderais bien d'aller plus loin pour ne pas susciter de vocations...). Cela dit et bien dit, l'affaire se dégonfle donc d'elle-même à la lecture attentive du billet qui révèle soit une erreur de voiture dans le train, d'horaire de train ou, très souvent, une erreur de date. L'histoire n'allant pas plus loin, je saisis l'occasion pour vous conseiller de lire le délicieux texte commis sur ce point par un fidèle voyageur...
Replacer tout un Tgv : "allo maman bobo" !
La (mini) catastrophe se présente essentiellement sur les Tgv qui ont été construits au fur et à mesure du développement des lignes à grande vitesse et qui donc, d'une génération sur l'autre, ne comprennent pas le même nombre de voitures, de places et, évidemment pour le Duplex, d'étages. Le moindre changement de matériel est donc susceptible de perturber la bonne installation des voyageurs. Deux grandes familles de migraine à disposition...
"On" s'est trompé lors de la vente des billets : les voyageurs sont en possession de billets pour un type de train et l'on sait déjà que cela ne sera pas celui-ci qui roulera. Moindre mal ! Les services compétents (si, si !) vont éditer des "listes de reclassement" : le chef de gare - reconnaissant - aura ainsi à disposition, voiture par voiture, la liste des reports de places. Le contrôleur lui-aussi reçoit normalement le précieux document, par mesure de prudence vous irez le voir sur le quai pour vérifier qu'il est au courant (c'est que ça se balade beaucoup les contrôleurs) puis vous partagerez avec lui la joie de réorienter les clients et voila l'affaire dans le sac !
Beaucoup plus douloureux, le Tgv qui arrive en gare n'est pas du modèle que l'on attendait.. ! Quelques noms d'oiseaux volent... Il n'empèche qu'il va bien falloir gérer le souci : dans un premier temps, se jeter sur l'ordinateur pour avoir une idée du nombre de voyageurs attendus sur ce train et vérifier que le nouveau matériel comprend suffisamment de places. A peu près en même temps (l'heure tourne et le défi consiste à malgré tout faire partir le train à l'heure selon votre obsession personnelle), faire le compte des troupes disponibles car c'est ce qui va définir la tactique. Bonne pioche : vous avez à disposition les agents de "l'accueil-embarquement" (chronique à venir) que vous allez recruter sans scrupules. En les disposant à chaque porte du train avec un plan de la voiture ils pourront replacer les voyageurs au fur et à mesure (on coche les places prises et quand la voiture est pleine on renvoit vers la suivante, simple et efficace). Mauvaise pioche : vous n'avez pas assez d'agents pour l'opération précédente et il va falloir gérer la chose par des annonces sonores sur le quai ce qui, d'expérience, n'est pas la panacée pour gérer plusieurs centaines de personnes... Dans tous les cas de figure, vous avez (encore) couru rejoindre le ou les contrôleurs qui viennent eux-aussi de découvrir la surprise de dernière minute et qui attendent de pied ferme vos solutions. L'option "annonces sonores" vous vaudra peut être un accueil frisquet mais tout le monde va remonter les manches et s'y coller !
L'immense majorité des replacements de dernière minute se passe bien, les voyageurs craignent avant tout de rester sur le quai et vos propositions de nouvelle place sont plutôt les bienvenues ; évidemment vous ne pouvez pas garantir le sens de la marche ni le placement côte à côte ; cela vous vaut quelques récriminations ... justifiées ! Et si vraiment cela chauffe trop fort, vous avez une arme secrête : proposer à vos clients de les replacer à la place de leur choix dans le train suivant ce qui suffit en général à calmer les ardeurs. On jettera un voile pudique sur les périodes de grands départs où tous les trains sont complets et le replacement impossible : à chaque jour suffit sa peine !
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