Parmi les mille et une petites tâches qui égayent la journée d'un chef de gare, il en est une dont les joies sont terriblement répétitives : la gestion des objets perdus. Egarés dans les trains ou en gare, gros ou petits, avec ou sans valeur, putrescibles ou pas : leur variété n'est concurrencée que par leur phénoménale quantité...
Du tout-venant au moins courant
De manière assez attendue, le gros de la troupe des objets perdus se répartit entre sacs de voyage, sacs à main, portefeuilles (voir plus loin) et autres manteaux, vestes, écharpes... Chaque jour apporte aussi son lot de téléphones portables, d'appareils photographiques numériques et de lecteurs Mp3 à faire pâlir d'envie un catalogue spécialisé. Jusque là c'est la routine ! Parfois, votre journée sera illuminée par le recueil d'un objet nouveau dans votre collection : un four, un violon, une glacière, des tringles à rideaux, une guitare, des stores, un casque de football américain, une télévision.. Au fil des mois, on pourra extraire quelques statistiques farfelues sur différentes populations. Ainsi, les hommes d'affaire croient utile ou performant de regrouper en une même pochette leurs cartes de réduction, coupons mensuels et billets du mois à venir : en effet, en cas de perte c'est beaucoup plus radical ! Le nombre ridicule de « doudous » qui nous reviennent laisse à penser que les parents font preuve, sur ce point, d'une vigilance extrême. Enfin, les futurs mariés - probablement sous le coup de l'émotion à venir - perdent avec constance leur robe ou costume de cérémonie, leurs pochettes de dragées, leurs chaussures blanches, leurs menus de banquet...
Gros plan sur l'itinéraire d'un portefeuille égaré... et chanceux !
On n'imagine pas le périple que va subir un portefeuille tombé d'une poche dans un train et fermement décidé à retrouver son propriétaire... S'il n'est pas recueilli par un voyageur honnête ou un contrôleur, il lui faudra se faire suffisamment discret pour ne pas éveiller la cupidité des visiteurs des trains mais assez visible pour être récupéré par les agents du nettoyage et pouvoir ainsi échouer sur le bureau du chef de gare. Dans la version « happy end » de cette histoire, le cheminot trouve le nom du propriétaire dans le portefeuille, fait immédiatement passer une annonce dans la gare, l'heureux possesseur se présente rapidement, émouvantes retrouvailles. En version « unlucky », les annonces restent sans effet (la perte n'a pas encore été constatée, la personne a déjà quitté la gare, ...) et le portefeuille va devoir prendre son mal en patience car...
Les objets perdus deviennent des objets trouvés
Vu les quantités à gérer, les grandes gares disposent souvent de leur propre service "objets trouvés". Notre portefeuille y retrouvera ses compagnons d'infortune. S'il contenait une pièce d'identité ou un document avec une adresse, les agents du service enverront un petit mot pour informer que l'égaré est en leur possession, sinon il lui faudra attendre que son propriétaire se présente. Au bout de deux mois, les objets seront envoyés au service des Domaines qui les vendront en lots de parapluies, téléphones, ... Les pièces d'identité sont, à ma connaissance, détruites... Dans l'autre sens, les voyageurs ayant perdu quelque chose peuvent se présenter aux « objets trouvés » pour y déclarer une perte grâce à une petite fiche descriptive ; ils seront prévenus si l'on retrouve leur bien. Une exception toutefois : aucune denrée périssable n'est conservée.
Vie et mort d'un sac de victuailles
Ayant eu la chance d'exercer mes talents en gare en un mois de juillet ensoleillé, j'ai découvert - à mes dépens - le problème des provisions de voyage. Etant donné que le service des objets trouvés est fermé du vendredi soir au lundi matin, le chef de gare dispose de son propre local de stockage, petit, sombre et hermétiquement fermé mais bien pratique malgré tout. Jusqu'à ce samedi soir de (mini) canicule où venant déposer un énième balluchon, vous êtes assailli par une bouffée putride !!! Diagnostic évident : de la nourriture est en train de tourner mal. Intervention beaucoup plus difficile car il est totalement, absolument et réglementairement interdit d'ouvrir les sacs entreposés là... L'alternative est donc soit de tout jeter (à la rigueur après avoir mené une enquête olfactive pour repérer le coupable) soit de supporter la chose jusqu'au lendemain. Les deux options présentent des inconvénients sérieux : devoir expliquer à un client que vous avez jeté son sac de voyage pour un sandwich ou devoir convaincre vos collègues de travailler encore 24 heures dans cette puanteur. Foin du règlement et de l'éthique, vous vous retrouvez à faire le tri entre jambon-beurre moisissants, bananes liquéfiées, yaourts éventrés, ... sans oublier de maudire copieusement les vendeurs de souvenirs gastronomiques odorants. Vous êtes dans votre tort, vous le savez mais quelqu'un a-t-il une (meilleure) idée ???
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Bonjour,
je lance aujourd'hui un nouveau site sur les objets trouvés et je trouve votre témoignage très intéressant (et très bien écrit). si vous l'acceptez, j'aurais quelques questions à vous poser sur ce sujet...
voici mon téléphone : 0950 35 44 75.
en vous remreciant
bien cordialement
Adeline Tissier
Rédigé par : | 13 janvier 2009 à 10:24